Faire entendre la voix des femmes sur leurs corps, leurs plaisirs, leurs sexualités.

Female Pleasure, Barbara Miller, 2018.

#Female Pleasure

Le patriarcat est une religion universelle.

#Female Pleasure, Barbara Miller.
#Female Pleasure, Vithika Yadav, Love Matters
#Female Pleasure, Vithika Yadav, Love Matters

Cinq héroïnes, cinq pays, mais un message commun : il faut encore se battre pour que les femmes puissent disposer de leur corps et que leur plaisir sexuel ne soit pas interdit, contrôlé ou censuré. Certain·e·s pourraient imaginer, un peu naïvement il faut se l’avouer, que #Female Pleasure met en lumière des pratiques ancestrales d’un autre siècle. Mais non, ce documentaire date de 2018 et la parole de ces femmes devient le reflet du patriarcat et de ses préceptes oppressifs qui sont bels et bien ancrés. 

Les premières images qui défilent annoncent la couleur. Sur ces affiches publicitaires qui s’enchaînent on voit des femmes nues, aux corps retouchées, pulpeux mais fins. Elles sont toutes aux mains d’hommes – parfois même allongées sous leurs pieds –  afin de mieux vendre parfum, alcool, jeans et autres produits en tous genres.  “Les femmes doivent satisfaire les désirs des hommes“, fait remarquer l’artiste Rokudenashiko en rentrant dans un sex-shop japonais où  prolifèrent divers orifices féminins siliconés.

Ainsi, que ce soit Leyla Hussein, Doris Wagner, Rokudenashiko, Vithika Yadav ou Deborah Feldman, toutes veulent que leurs voix portent par-delà leur pays, leurs traditions, leurs oppressions.

Deborah Feldman
#Female Pleasure, Deborah Feldman

La première a grandi en Somalie et fut excisée à l’âge de 7 ans. La deuxième était soeur dans l’église catholique et fut la victime de viols par  le Père Burkhard. La troisième est une artiste japonaise qui a été arrêtée par la police après avoir modélisé en 3D son vagin, pour en faire un canoë. La quatrième vient d’Inde et a créé le site Love Matters qui donne des conseils en matière de relations, d’amour et de sexualités. La dernière a réussi à sortir de la communauté hassidique de Brooklyn, où elle s’est mariée à l’âge de 17 ans et a eu un enfant peu de temps après.

Cinq pays, cinq cultures. Ce balayage de traditions met le doigt sur les préceptes des différentes religions qui stipulent l’infériorité des femmes. Christianisme, judaïsme, bouddhisme, islam et brahmanisme ; tous la conçoivent comme étant la source du mal, de la honte et du péché dans le monde. Les témoignages s’entremêlent et une incrédulité désespérée  commence à monter en nous. On arrive à se demander, en écho aux protagonistes : qu’ont-donc fait les femmes depuis la nuit des temps, pour mériter tout ça ? 

Ainsi ces portraits s’alternent sur fond de récits de violences sexistes et sexuelles, entrecoupés par des citations des différents textes religieux. Plus qu’une nouvelle dénonciation féministe, #Female Pleasure devient “un plaidoyer pour le droit à l’autodétermination et une sexualité épanouie pour les femmes” comme le dit si bien Barbara Miller. 

Ces femmes  deviennent le reflet de la non-liberté que chacune a de disposer de son corps, de sa sexualité et de ses désirs. Bien évidemment, chaque spectateur·trice  a en tête que ces pratiques abjectes – telles que l’excision ou les viols dans l’institution religieuse – ont lieu. Mais il s’agit ici surtout de lier ces voix pour n’en faire qu’une, comme un grand cri qui se propagerait face à tout cela. Il faut s’unir, se soutenir et oser parler pour que chacune puisse s’identifier dans ces cinq expériences montrées en grand format. Barbara Miller donne la parole pour empêcher l’oubli et la sous estimation de la violence contre leurs corps et leurs désirs,  qui sont simplement dues à leur genre féminin.  Mais elle exhibe aussi le pouvoir des femmes quand elles s’allient.

Le corps des femmes est contrôlé mais il semblerait que leur parole aussi. Barbara Miller dénonce cette censure qui touche le corps féminin et son plaisir mais il semblerait que sa propre parole connaisse la même condamnation.  En effet, les publications de la page Facebook de #Female Pleasure, qui annoncent les lieux de diffusion semaine après semaine, ont été censurées. Simple erreur algorithmique de Facebook face à la multiplication de publications similaires ou alors réelle condamnation du plaisir féminin ? 

#FemalePleasure équipe
De gauche à droite : Barbara Miller, Rokudenashiko, Leyla Hussein, Vithika Yadav, Doris Wagner.
 
Emma

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